Déjà, venant hérissonné L’hiver, de froid environné, S’en va la plaisante verdure De l’été, qui si peu ne dure ; Déjà les arbres tout honteux Il dépouille de leurs cheveux, Et dans la forêt éfeuillée Court mainte feuille éparpillée ; Et déjà Zéphyre mollet, Le mignard et doux ventelet, Craignant la fureur de Borée, S’en est allé ; Vénus dorée Et de nos chants la volupté Ont avecque lui tout quitté : Et le suivent en autres places Phœbus, les Muses et les Grâces, Et les oisillons sautelants Avecque lui s’en vont volants. Nous aussi donc troussons bagage, Quittons la douceur du bocage, Attendant que le printemps doux Ici les ramènera tous, Avec le gracieux Zéphyre Qui de Borée ne craindra l’ire. Allons, Phyllis, mignonnne, allons, Quittons désormais ces vallons, Allons aux villes mieux garnies Passer l’hiver aux compagnies.
Cependant adieu je vous dis, Jardin, l’un de mes paradis. Adieu, fontaine, adieu, rivages, Adieu, de nos bois les ombrages ; Adieu Fresnaie, ore, qui m’es plus chère que ne fut jamais A roi sa maison sourcilleuse D’architecture merveilleuse. Je m’en vais, mais je laisse en toi Mon cœur, meilleure part de moi.
Vauquelin de La Fresnaye – Les Diverses Poésies – 1605 // dessins Daniel Rabel 1578-1637, peintre, graveur, miniaturiste, décorateur et botaniste français.