Cinq doigts

Regarde la, ma ville
Elle s’appelle Bidon,
Bidon bidon, Bidonville
Vivre là-dedans c’est coton
Les filles qui ont la peau douce
La vendent pour manger
Dans les chambres, l’herbe pousse
Pour y dormir, faut se pousser
Les gosses jouent, mais le ballon
C’est une boîte de sardines, bidon
Donne-moi ta main, camarade,
Toi qui viens d’un pays
Où les hommes sont beaux
Donne-moi ta main, camarade
J’ai cinq doigts, moi aussi
On peut se croire égaux

Regarde la ma ville
Elle s’appelle Bidon
Bidon, bidon, Bidonville
Me tailler d’ici, à quoi bon ?
Pourquoi veux-tu que je me perde
Dans tes cités ? À quoi ça sert ?
Je verrais toujours de la merde,
Même dans le bleu de la mer
Je dormirais sur des millions
Je reverrais toujours, toujours bidon.

Donne-moi ta main, camarade,
Toi qui viens d’un pays
Où les hommes sont beaux.
Donne-moi ta main, camarade.
J’ai cinq doigts, moi aussi.
On peut se croire égaux.

Serre-moi la main, camarade
Je te dis  « Au revoir »
Je te dis  « A bientôt »
Bientôt, bientôt,
On pourra se parler, camarade.
Bientôt, bientôt,
On pourra s’embrasser, camarade.
Bientôt, bientôt,
Les oiseaux, les jardins, les cascades.
Bientôt, bientôt,
Le soleil dansera, camarade.
Bientôt, bientôt,
Je t’attends, je t’attends, camarade.

C.Nougaro.

Dieu aux corbeaux

Corbeau, loyal serviteur des dieux et des hommes. Il est la personnification des dons de connaissance et de savoir d’Odhinn. Deux corbeaux sont perchés sur ses épaules et lui disent à l’oreille tous les événements qu’ils voient ou entendent. L’un s’appelle Huggin (‘la Pensée’) et l’autre Muninn (‘la Mémoire’). À l’aube, il les envoie parcourir le monde entier et à leur retour, il s’enquiert de toutes les nouvelles qu’ils ont à lui annoncer. C’est pour cette raison qu’il est appelé le  »dieu aux corbeaux » et qu’il est omniscient. En outre le corbeau est au service de la vie: lors de la navigation, il indique le bon chemin. C’est ainsi que l’un des découvreurs de l’Islande, Floki Vilgerdharson, se serait servi de trois corbeaux censés lui avoir indiqué sa route. En mer, il lâcha le premier, qui revint se poser sur l’étrave. Le second vola droit en l’air, puis revint au bateau. Le troisième vola tout droit au-devant de la proue dans la direction où ils découvrirent le pays. (Une histoire semblable se trouve dans le livre de la Genèse, VIII, 6-7.)

L’image du corbeau n’est pas sans ambivalence : dispensateur de vie, bienfaiteur des hommes, il est aussi présage de mort, car c’est un charognard. Cette ambivalence est également la caractéristique d’Odhinn, qui prodigue tantôt la victoire, tantôt la mort.

On retrouve le corbeau dans l’ancien nom de la ville de Lyon, Lugdunum, qui signifie ‘colline de Lug’. Chez les Celtes, Lug (‘le Guerrier’) est le dieu de la guerre et de la victoire. Il protège les arts, tout comme Odhinn, chez les Nordiques, et est à la fois le dieu de la victoire et de la poésie. Le mot dérivé de son nom, lugos, dans la langue des Gaulois, est utilisé pour désigner le corbeau, oiseau oraculaire.

Les gonfanons des Vikings arboraient d’ailleurs l’image d’un corbeau qui déployait et faisait battre ses ailes afin d’obtenir d’Odhinn la victoire.

Patrick Guelpa, les 100 légendes de la mythologie nordique – Que sais-je.

Dommage qu’aujourd’hui le corbeau ne soit plus associé qu’à la mort (sorcières, charognes et fantômes). Fascinant, non, ce glissement des symboles, du sens qu’on leur donne, au fur et à mesure que s’écoulent les siècles … Témoins d’appauvrissement de la pensée ou à l’inverse, d’installation enrichie siégeant dans le dictionnaire, témoins des modes, des pouvoirs dominants, des aversions ou des attirances… Que va devenir notre corbeau, dans ce XXIe s. ? un nom sur un inventaire détaillée de la faune en voie de disparition ou de nouveau l’intercesseur entre le ciel et nous ? L’avant dernier opus de Lou Reed, ‘The Raven’, construit sur le ‘The Raven’ de Poe que Doré a illustré… histoire d’amour et son fantôme matérialisé par un corbeau… me paraît être la dernière allusion du XXe s. au corbeau. Allez, Pensée…  Avance … !

Un corbeau dans les platanes – sur mon chemin, 15-11-18.

Dors bien…

 

J’ai regardé pour la 4e fois hier soir, Interstellar, le film de Christopher Nolan, de 2014. C’est un film qui me laisse toujours partagée, troublée. À chaque fois, j’en comprends davantage sur les raisons de mon trouble (heureusement me direz-vous) : cette science-fiction n’en est pas, et mieux vaudrait l’appeler physique-fiction car c’est un film construit non pas sur la science (qui n’est plus, aujourd’hui que techniciste ultra sophistiquée) mais sur la physique et ses lois. La base. Ce film, comme un plaidoyer pour le futur est très divertissant (les sentiments abondent, c’est agréable ) mais ça s’arrête là,  parce qu’à mon avis il n’y a aucune raison de vouloir sauvegarder l’humanité.

 

 

Une route

…  »Y’a une route C’est mieux que rien Sous tes semelles c’est dur et ça tient…. » G.Manset

Cette route, unique, quitte Méthamis par la gauche au fond, et grimpe en lacets dans les monts sauvages du Vaucluse. Là, tout y est sauvage, pas de maisons ou alors rares, des fermes, encore actives qui cultivent la cerise, des raisins et de la lavande. Il serait très facile de disparaître de la surface du monde dans ces monts… et j’y ai rencontré d’étranges habitats au milieu de nulle part, isolés, cachés… et pas âme qui vive malgré les traces évidentes de leur vie et ça me laisse toujours « songeur ».

-sur la route de Méthamis à Monnieux – 18-11-18-

 

3 – Rien ne va plus

 

Ça ne s’arrange guère on dirait. Pourtant à en croire les gens que je rencontre « ça va ». Je cherche l’indiscernable changement de ton, le plissement de l’oeil, l’ombre sur les traits dans le « ça va » de base qu’on s’échange tous… mais, rien. Est-ce moi qui prend trop au sérieux ce que j’entends, lis, vois, vis et ressens ? Parce que non, vraiment, à mon avis « ça ne va pas » , et même « rien ne va plus ».

Ce midi sur F.Inter, au journal pendant que je déjeunais : « L’ONU alerte : les quantités mesurées du CO2 n’ont jamais été aussi importantes dans l’atmosphère de notre planète ». Cool. Et donc ? Et donc rien, « ça va »…. (Que fais-tu pour Noël ? voyage low cost sur ta planète ? bonjour ton empreinte carbone… Hyper consommation dans les zones commerciales, et autres centres villes de notre belle France, devenue aussi vulgaire dans ces galeries marchandes surchauffées et suréclairées et « sur » tout, qu’une poule de luxe appareillée pour riches vieux beaux ? bonjour les emballages papier et plastiques que ça génère dans les containers prévus à cet effet, et puis bonjour le budget parce que les prix… Ski sur neige artificielle ? les communes des Alpes ne manquent pas de ressources : ça bombarde d’eau « ensemencée »… Bon, il n’ y a plus d’eau dans le Doubs et les forêts du Jura sont sur le point de non -retour mais « ça va ». Il va bien pleuvoir.) Surtout ne changeons rien. On est le 22 novembre 2018, ce soir il fait 13°C chez moi. Rien d’exceptionnel, pourtant, depuis le mois d’août, il a fait froid 3 jours et le solstice d’hiver approche, c’est à dire que les jours rallongeront… déjà…..

Je viens de terminer un livre édifiant : Histoire de la Peste, au PUF par Jean Vitaux, version Kobo (un Kobo est un lecteur fnac et pas un nouveau dialecte africain). Pas très bien écrit, un peu répétitif parfois mais passionnant, car on y apprend TOUT sur la façon dont fonctionne une épidémie de peste, sur son histoire et donc celle des hommes… Comment ne pas anticiper, vu le nombre d’habitants sur Terre, vu l’avancée de la pauvreté, vu le réchauffement (montée des eaux, acidification des océans, dégel des pergélisols, douceur des températures, transformation de l’atmosphère) que les années qui arrivent ne vont pas être le théâtre d’effroyables épidémies ?

Bon, « ça va » pour ce soir. Je vais finir de regarder Terminator 2 sur OCS que je n’avais jamais vu. Incroyable de constater qu’en 1991, James Cameron avait anticipé drônes, I.A, guerre totale… ainsi que la pauvreté de la langue même si j’y ai entendu des quantités d’insultes inimaginables et qui m’étaient totalement inconnues jusque là !  Il n’y a pas d’âge pour apprendre.