On dit qu’en Bretagne il pleut quatre jours sur trois, ce qui ne laisse guère de temps pour autre chose. Eh bien, c’est peut-être ma chance, mais nous sommes en plein mois de janvier, et le ciel est prodigieusement bleu. Le ciel est bleu, mon manteau est bleu, ma chemise est bleue, mon blue-jean franciscain est bleu, et une flamme bleue, elle aussi, éclaire vivement mon cerveau d’idiot.Je suis un diable bleu et le soleil est perché sur mon épaule, riant comme l’enfer. À voyager ainsi, où est-ce que je vais ? Nulle part. Je traverse bien des lieux de l’esprit, péniblement quelquefois, pour n’aller nulle part. Nulle part c’est difficile, mais j’y arriverai un jour. nulle part, c’est partout, c’est parmoi. Et moi, qui suis-je ? Un signe de l’infini; quelque chose comme un zéro.
Kenneth White – Dérives // Plage Napoléon, bécasseaux sanderling 12 janvier 2010.