Suite de ma poursuite des orchidées : aujourd’hui le massif du Lubéron, du moins un petit morceau, au -dessus de Céreste. Toute la journée s’est passée dans les nuages et les averses paisibles. Tant mieux pour les sols et tous les végétaux en plein boum, et tant mieux pour moi, les chemins, routes et paysages sont vides, si ce n’est comme toujours ici, des Allemands en balade dans leurs voitures très chères et des gars du coin en 4×4, très très affairés à dieu sait quoi.
La belle orchis pourpre est partout…. abondante et joyeuse au milieu de l’orgie de fleurs…
Et puis, dans un endroit où je trouve, printemps après printemps des espèces plutôt magnifiques et rares, je tombe sur cette ophrys mouche (ophrys insectifera) jamais rencontrée par ailleurs … quelle émotion !
Et, en une abondance paradisiaque, la sublime cephalanthère à longues feuilles (Cephalanthera longifolia) illumine les sous-bois ennuagés et vernis d’eau par ses fleurs blanc pur, dressées…
Pour finir la balade lubéronne dans un sous-bois étoilé d’or, semblable à une nuit d’été…
Depuis le mois de janvier, dans le périmètre de ma vie, au hasard des chemins où je passe, j’ai pris en photo ces fleurs mythiques, les orchidées sauvages. Longtemps le privilège de ma mère qui les cherchaient par jeu, dans le moindre de leurs retranchements, c’est récemment que je me suis mise, à pas comptés, dans ses traces, pour explorer ce monde fascinant. Printemps après printemps (3 exactement) je découvre, nomme et admire ses étranges compagnes de nos vies aux formes admirables, comme intelligentes.
« [Odette] tenait à la main un bouquet de catleyas et Swann vit, sous sa fanchon de dentelle, qu’elle avait dans les cheveux des fleurs de cette même orchidée attachées à une aigrette en plumes de cygne. » M.Proust, Du côté de chez Swann.
L’ophrys bécasse – ophrys scolopax -, 18 mai
L’ophrys araignée – ophrys sphegodes-, mars
L’ophrys brun – ophrys fusca-, mars
On estime à 25 000 environ le nombre d’espèce d’orchidées dans le monde, entre 350 et 400 en Europe, 170 en France et 64 dans la zone du Ventoux. Le nom d’orchidée vient du grec Orkis = testicule, en allusion à la forme de tubercule des racines de ces plantes. La connaissance des orchidées s’est développée par tradition orale, dans le cadre de croyances populaires plus ou moins mystérieuses, basées sur certaines pratiques païennes ou médicinales voire culinaires. C’est à la forme de ses tubercules que nous devons des vertus aphrodisiaques à certaines préparations, altérant ou vivifiant la virilité masculine. Cette croyance est encore très vivace en Tunisie. Au Moyen-Orient, le salep, préparation d’un liquide à base de tubercules séchées et pilées est consommé avec délectation, mettant en danger par l’arrachage de plusieurs dizaines de tonnes de tubercules, la conservation des orchidées dans ces régions. Du XVIIe au XIXe s. l’orchidée exotique devient un objet de collection, -non plus pour ses tubercules mâles mais pour sa fleur femme-, un objet de luxe, convoitise des grandes bourgeoisies anglaise et parisienne (cf. le catleya de Proust), ayant pour conséquence le pillage de certaines zones de forêts équatoriales. Depuis plus de 50 ans, les orchidées européennes sortent de l’ombre.
l’orchis pourpre – orchis purpurea- « commune » , mai
La menace qui pèse sur les orchidées est directement lié à la disparition de leurs milieux : zones humides, pâtures, landes calcaires, fûtaies mais aussi à l’utilisation des pesticides qui éradiquent les pollinisateurs… bref, un peu à tout ce qui est en cours actuellement chez l’humain : bétonnisation et chimie.
orchis militaire -orchis militaris- mai
platanthère à deux feuilles – platanthère bifolia- mai
Je n’aborderai pas la sexualité des orchidées, qui est multiple en fonction des espèces ! Je vais me contenter de continuer d’aller à leur rencontre, au hasard de mes chemins et m’ébahir de leur beauté. Demain, j’ai prévu une sortie vers elles. J’espère qu’elles seront au rendez-vous cette année encore.