Chers lecteurs, en raison du Covid qui a envahi nos vies, j’ai mis au point pour vous, durant le confinement, un site par abonnement donnant accès à mes petites vidéos de dessin : savoir-faire, histoire de l’art etc.
Ces courtes vidéos explicatives vous permettront de ne pas vous priver de votre activité dessin, ou, pour les novices, de se jeter dans ce monde extraordinaire de l’Image, qu’on la crée, qu’on la copie, ou qu’on la contemple. Quant à moi, ces vidéos me permettent de continuer à partager ma passion, mon travail avec vous.
Pour finir, je publie mes photos ainsi que des infos culturelles et artistiques sur instagram et twitter dont vous trouverez les liens sur la page d’accueil de mon site de vidéos. A très bientôt ! 🙂
L’inépuisable* Nature nourrit l’imagination et actionne les mains des hommes depuis le commencement de notre présence.
*J’écris Inépuisable du point de vue des ressources formelles et non pas d’un point de vue ressource matérielle, comme la plupart des gens l’entendent aujourd’hui.
Ne pas s’en passer… comment m’en passer… // bijoux mérovingiens et un peu de la forêt du mont Ventoux, 25 octobre 2019.
On vit. Au hasard des naissances, selon la nécessité des travaux. On habite des lieux dont on ne sait souvent rien tant l’indifférence est peut-être devenue le seul bien commun, l’unique communauté d’une absence en laquelle nous errons ou résidons parfois, ignorant le nom des chemins qui si longtemps conduisirent chacun vers l’accomplissement d’un destin certes borné, et dont la maigre mesure à nos yeux paraît être le fruit d’une indigence autant spirituelle que matérielle, mais qui n’effaçait pas tout à fait la réalité d’un sens.
On est seul au fond. Sans lieu. Sans durée. On a peur. Si peur que vivre ici, vivre ailleurs, vivre somme toute n’importe où, n’a plus aucune importance.
La trame du temps, celle de l’espace sont défaites. On rêve alors quelquefois. Ou l’on ne rêve plus. On ne se souvient plus que de l’oubli qui nous accable.
Lionel Bourg – L’oubli et la mémoire des lieux // Plaine d’Alsace, août 2019 – Lit de l’Ouvèze, septembre 1992 (photo Claude-Michel Desprez) – Massif des Cèvennes août 2019.
Imagine les yeux qui ont vu cela : le ciel s’ouvrant finement en une découpe nette laissant surgir cette forme mystérieuse d’un au-delà du bleu visible et plein et des nues le parcourant.
Quelles insondables sensations a fait jaillir chez ceux qui le voyait, ce disque partiel tâché et lumineux surgissant ? Que penser face à la forme d’une nuit, d’un jour, apparaissant sans un bruit et disparaissant tout pareil ? L’envie me prend de dresser la liste de tous les sentiments que fait naître -et peut-être à eux de la même façon qu’à moi – cette forme incompréhensible se glissant subrepticement dans le bleu… la peur… l’inquiétude…l’étonnement… la terreur… l’incertitude… la curiosité… l’amusement… la prudence… la méfiance… l’espoir… et puis ce désir irrépressible de comprendre ! Bientôt, dans quelques décennies nous y apercevront – il paraît – des édifices humains à la recherche de matières disparues de Terre, (carrières, mines, engins, vaisseaux cargo… ) aussi j’aime profiter de cette virginité et tenter de me replonger dans le souvenir des premiers âges, quand l’homme démarrait tout juste sa course au chaos de l’ordre naturel de l’univers en en cherchant le sens, et en dénommant les choses. Le début du drame en somme. Ciel du 8 août 2019.
Le sirocco des derniers jours a emporté avec lui le vert. Il reste les beiges, blonds, blancs, bruns dans un crépitement d’air embrasé. La terre me fait penser à une belle hippie ; d’elle n’émane que de confuses notes et mots que j’attrape ou non au vol, comme les papillons du printemps …
…Mama Lion et son fulgurant ain’t no sunshine , Janis Joplin au summertime cassé, Joan Baez en wild mountain thyme évanouie… et le lapin blanc de Jefferson Air plane. Quelques accords des Pink Floyd passent comme des flocons incandescents dans le vent brûlant de juillet… sous ce soleil de René Char si puissant qu’il faut s’en cacher… ‘la lucidité est la blessure la plus rapprochée du soleil’. Mais toujours deux mots, antagonistes, complémentaires, indissociables ‘l’ombre et la lumière’-mon père et ma mère disparus-, yin et yang au centre de mes regards…
Depuis toujours pour moi l’été est blond ; un jour d’août – c’était dans ma onzième année-, mon père m’avait prise en photo dans les graminées près de la maison. Je n’aimais guère qu’il me prenne en photo, et pour m’adoucir, ma mère m’avait expliqué que c’était important comme prises de vue à cause des blonds qui se faisaient écho. Mon père était photographe. Il a travaillé sur la lumière avant qu’elle ne disparaisse de sa vie en 1992 à Vaison, emportant son œuvre. À cette époque, (1976, celle de la photographie) les photographes utilisaient des pellicules (lui, c’était Kodak, il n’aimait pas les Fuji qui dénaturaient les rouges ) et conservaient leurs photos sur des diapositives. On les visionnaient sur des écrans à l’aide d’un projecteur. Pour ça on s’installait dans le noir, un peu comme dans une salle de cinéma, en un rituel parfois pesant pour la petite fille que j’étais alors. J’ai pu récupérer quelques boîtes de diapositives qui ont subsisté. Je les ai numérisé pour les conserver à l’abri du temps.
Cette année encore, comme tous les ans, je regarde les champs mûrir et les blonds envahir les paysages en entendant la voix de mes parents me parler de la couleur de l’été. Non, pas un été ne se passe sans que je revive ces heures et sans que le blond des champs ne m’emporte.
Parce que l’été est blond, oui, comme l’enfance…
Photos argentiques CMD 1-1976, 2-1977, à Flagy // Dans les collines, champs de graminées et plumets (stipa pennata) à Carroufra, le 21-06-19
Depuis le mois de janvier, dans le périmètre de ma vie, au hasard des chemins où je passe, j’ai pris en photo ces fleurs mythiques, les orchidées sauvages. Longtemps le privilège de ma mère qui les cherchaient par jeu, dans le moindre de leurs retranchements, c’est récemment que je me suis mise, à pas comptés, dans ses traces, pour explorer ce monde fascinant. Printemps après printemps (3 exactement) je découvre, nomme et admire ses étranges compagnes de nos vies aux formes admirables, comme intelligentes.
« [Odette] tenait à la main un bouquet de catleyas et Swann vit, sous sa fanchon de dentelle, qu’elle avait dans les cheveux des fleurs de cette même orchidée attachées à une aigrette en plumes de cygne. » M.Proust, Du côté de chez Swann.
L’ophrys bécasse – ophrys scolopax -, 18 mai
L’ophrys araignée – ophrys sphegodes-, mars
L’ophrys brun – ophrys fusca-, mars
On estime à 25 000 environ le nombre d’espèce d’orchidées dans le monde, entre 350 et 400 en Europe, 170 en France et 64 dans la zone du Ventoux. Le nom d’orchidée vient du grec Orkis = testicule, en allusion à la forme de tubercule des racines de ces plantes. La connaissance des orchidées s’est développée par tradition orale, dans le cadre de croyances populaires plus ou moins mystérieuses, basées sur certaines pratiques païennes ou médicinales voire culinaires. C’est à la forme de ses tubercules que nous devons des vertus aphrodisiaques à certaines préparations, altérant ou vivifiant la virilité masculine. Cette croyance est encore très vivace en Tunisie. Au Moyen-Orient, le salep, préparation d’un liquide à base de tubercules séchées et pilées est consommé avec délectation, mettant en danger par l’arrachage de plusieurs dizaines de tonnes de tubercules, la conservation des orchidées dans ces régions. Du XVIIe au XIXe s. l’orchidée exotique devient un objet de collection, -non plus pour ses tubercules mâles mais pour sa fleur femme-, un objet de luxe, convoitise des grandes bourgeoisies anglaise et parisienne (cf. le catleya de Proust), ayant pour conséquence le pillage de certaines zones de forêts équatoriales. Depuis plus de 50 ans, les orchidées européennes sortent de l’ombre.
l’orchis pourpre – orchis purpurea- « commune » , mai
La menace qui pèse sur les orchidées est directement lié à la disparition de leurs milieux : zones humides, pâtures, landes calcaires, fûtaies mais aussi à l’utilisation des pesticides qui éradiquent les pollinisateurs… bref, un peu à tout ce qui est en cours actuellement chez l’humain : bétonnisation et chimie.
orchis militaire -orchis militaris- mai
platanthère à deux feuilles – platanthère bifolia- mai
Je n’aborderai pas la sexualité des orchidées, qui est multiple en fonction des espèces ! Je vais me contenter de continuer d’aller à leur rencontre, au hasard de mes chemins et m’ébahir de leur beauté. Demain, j’ai prévu une sortie vers elles. J’espère qu’elles seront au rendez-vous cette année encore.
En m’approchant, j’ai découvert l’homme enfermé dans la fleur de pissenlit en graines. J’ai été surprise ! l’espace d’un instant mon cœur s’est serré et a battu la chamade, mes yeux se sont écarquillés et je l’ai pris en photo pour qu’on le voie. Il tournait là, sur son petit tapis moelleux, au centre des barreaux duveteux; j’ai eu peur qu’il me fasse signe. Il m’a fait penser à ces personnages qu’on rencontre dans le Petit Prince, ces êtres seuls sur leurs planètes solitaires. J’ai trouvé ça terrible d’être enfermé à l’air libre , de voir le monde sans pouvoir y être, puis je me suis dit qu’en réalité, quelle que soit la taille de sa prison, on est tous logés à la même enseigne. Une planète à l’atmosphère protectrice et vitale… une maison pour y demeurer… un bureau pour y travailler… un manteau pour s’y réchauffer… … un ventre pour y pousser… un ovule pour s’y diviser… une cellule… une molécule d’ADN… À quel moment est-on libéré ? Sur mon chemin, pissenlits, 4-04-19